L'utilisation de larmes sur les pistes d'un circuit imprimé est l'un des principaux éléments susceptibles d'impacter la fiabilité d'un assemblage de PCB.
Les larmes sont particulièrement utiles et peuvent même être exigées par certains fabricants pour les produits de classe III, afin d'étendre l'anneau résiduel sur un trou percé.
Comme pour de nombreuses considérations de fiabilité, la question de l'intégrité du signal est primordiale, notamment parce que les produits à haute fiabilité exigent aujourd'hui des capacités de traitement des données plus importantes et fonctionnent à des vitesses plus élevées.
Puisque les interfaces haute vitesse fonctionnent avec des paires différentielles, la question qui nous vient naturellement à l'esprit est :
C'est justement la question que m'a posée Mario Strano, qui est récemment intervenu dans un épisode de notre podcast.
Il s'agit d'un enjeu considérable pour la conception haute vitesse, puisque les larmes engendrent un écart d'impédance côté entrée d'un via. Sur le plan conceptuel, je pense qu'il s'agit d'un point à ne pas négliger, car les larmes sont importantes pour la fiabilité, et cela montre que nous ne perdons pas de vue leur impact sur l'impédance.
Dans cet article, je vais détailler les difficultés qui accompagnent l'utilisation de larmes sur des paires différentielles et comment celles-ci peuvent affecter l'impédance.
Commençons par évoquer les raisons pour lesquelles des larmes peuvent être placées sur une paire différentielle (ou toute autre piste) routée vers un via.
Au cours de la fabrication, lorsque sont percés les trous des vias ou encore d'autres trous de montage ou trous traversants non plaqués, il arrive parfois que la perceuse s'échappe entre les trous et manque légèrement sa cible. Si cette errance est importante, alors la perceuse risque d'isoler une piste ou un tampon de connexion du via, laissant ainsi une connexion en circuit ouvert après le plaquage.
Des larmes peuvent ainsi être placées afin de prévenir tout évasement des trous de perçage susceptible d'isoler une piste connectée à un tampon de via. L'idée est ici de placer du cuivre supplémentaire de manière à empêcher toute rupture de pistes lors du perçage.
Certains ateliers de fabrication IPC de classe 3 recommandent l'utilisation de larmes, ce qui soulève la question de l'intégrité du signal sur des interfaces haute vitesse. Comment ces éléments affectent-ils les signaux haute vitesse, en particulier sur les paires différentielles ?
Il s'agit là d'une question essentielle, car les interfaces haute vitesse standard utilisent des signaux différentiels et de plus en plus de produits à haute fiabilité intègrent ces protocoles.
Croyez-le ou non, nous pouvons une fois de plus tirer des enseignements essentiels des pratiques de conception de circuits imprimés RF. En effet, ces pistes différentielles comportent une section conique, que les ingénieurs RF utilisent généralement pour faire correspondre les impédances.
En fait, ces sections coniques sont utilisées comme éléments de transition depuis les microrubans jusqu'aux guides d'ondes intégrés au substrat (SIW) et aux guides d'ondes coplanaires mis à la terre. L'ajustement de l'impédance fourni par ces éléments peut être à large bande et offre une réponse de phase très cohérente entre les résonances des signaux RF avec une bande passante modérée.
Pour les signaux numériques, nous devons tenir compte de quatre défis lorsque nous examinons l'impact des larmes sur les signaux haute vitesse :
En raison de ces quatre points, minimiser l'impact d'une larme sur les paires différentielles nécessite de sélectionner la largeur et la longueur de section conique appropriées.
Cependant, étant donné que l'impédance de piste diminue pour une largeur supérieure, il faudra aussi s'assurer que l'impédance d'entrée au niveau du via (valable uniquement pour les hautes fréquences) est inférieure à l'impédance en mode impair de la piste d'entrée avant la section conique.
Pour les paires différentielles, cela implique de contrôler l'espacement entre les paires et la longueur/l'angle de conicité le long de la larme. Examinons chacun de ces points.
Ensuite, nous devons déterminer la longueur de la section conique des larmes. Encore une fois, prenons l'exemple d'un système RF avec une section de correspondance conique.
Si vous avez besoin de faire correspondre l'impédance avec un affaiblissement de réflexion constant et sans comportement de résonance jusqu'à des largeurs de bande élevées, alors la section conique doit fournir une transition d'impédance lisse jusqu'à la limite de largeur de bande requise.
La limite de largeur de bande dans ces sections coniques est définie par une transition de phase, marquée par une interférence constructive à une fréquence de résonance particulière (voir ci-dessous).
La bande passante doit être limitée car la section conique agit comme un filtre passe-haut et qu'il existe une certaine longueur électrique au-delà de laquelle elle agira comme sa propre section courte de ligne de transmission si elle est correctement adaptée au via.
Nous pouvons voir à quel niveau la section conique devient limitée à la bande en s'appuyant (à nouveau) sur les informations relatives aux sections coniques de manière générale.
L'exemple ci-dessous montre un microruban dont la largeur est réduite de 50 ohms à 40 ohms en sortie, avec une larme sur le diélectrique Rogers 3003. Nous pouvons immédiatement constater que la limite de bande passante englobe des fréquences supérieures lorsque l'angle de conicité est réduit.
Une correspondance parfaite ne s'obtient qu'à des fréquences spécifiques, mais il existe des fréquences moyennes auxquelles le spectre d'affaiblissement de réflexion est plat.
Ce qui précède suppose également que le côté sortie de la section conique présente une correspondance parfaite avec le via, ce qui peut ne pas être le cas. Dans ce cas, l'affaiblissement de réflexion diffèrera alors et sera dominé par le coefficient de réflexion à l'entrée du via à des fréquences plus basses.
Déterminer une expression analytique pour l'impédance d'entrée en fonction de l'angle de conicité de la larme est un point que j'aborderai dans un deuxième article, car il mérite qu'on lui accorde une attention toute particulière.
L'espacement des paires différentielles déterminera en partie l'impédance en mode impair de chacune des pistes de la paire.
Si ces pistes s'effilent les unes dans les autres, la diminution de l'espacement entre les larmes réduira alors encore l'impédance jusqu'au via. L'impact de ce phénomène sur l'impédance d'entrée (et donc les paramètres S et la conformité des canaux) variera en fonction de l'espacement et de la longueur des sections coniques ainsi que de l'angle de conicité.
Si l'espacement était déjà important et que vous placez des larmes sur la paire différentielle sans les incliner, alors l'écart d'impédance constaté en mode impair sera supérieur à la normale, car l'espacement diminue le long de la section conique. L'impédance simple sera déjà réduite le long de la section conique, mais un espacement moindre sur cette longueur renforcera ce phénomène.
Si vous avez conçu votre paire différentielle avec un espacement suffisant (côté droit) et que vous avez utilisé un diélectrique fin sous vos paires (en particulier pour les microrubans), le placement de larmes sur une paire de vias différentiels n'aura pas d'impact significatif sur l'impédance.
En effet, l'impédance était déjà dominée par la présence de la masse. Si vous inclinez ensuite les pistes, vous constaterez un écart d'impédance inférieur par rapport à l'impédance différentielle au niveau de la paire de vias.
En nous appuyant sur les points évoqués précédemment, nous pouvons énoncer les conclusions suivantes en ce qui concerne l'utilisation de larmes sur des paires différentielles :
Malheureusement, le troisième point « La largeur finale doit correspondre à l'impédance d'entrée des vias différentiels » risque bien de poser quelques difficultés.
Je ne connais qu'une seule méthode à peu près précise pour les calculs d'impédance de vias différentiels, et elle part du calcul du délai de propagation à travers une paire de vias différentiels.
La plupart des calculateurs d'impédance de vias à extrémité unique sont totalement inexacts et ne produisent rien qui ne soit à la hauteur des résultats obtenus avec un TDR. Il n'est donc pas logique de commencer par là.
De plus, la plupart des calculateurs d'impédance de vias ne sont pas basés sur des modèles à large bande. Ils ne prendront donc pas en compte la propagation ni l'excitation de mode, et ne produiront pas non plus un résultat précis à des fréquences élevées, ce qui est exactement là où vous auriez besoin de précision pour les signaux haute vitesse !
Bien que les larmes soient souvent recommandées pour assurer la fiabilité du circuit et que certains ateliers de fabrication les conseillent par principe pour tout produit de classe 3, elles ne sont pas pour autant un prérequis pour la fiabilité.
Prenons l'exemple des fonds de panier OpenVPX. Vous ne verrez aucune exigence relative aux larmes, et il ne m'a jamais été demandé d'en ajouter à l'un de ces fonds de panier (3U ou 6U).
J'évoque cette norme ouverte en particulier, car les exigences de conception associées, nécessaires pour garantir la fiabilité, sont plus conservatrices que celles que vous appliqueriez pour des produits de classe 2 ou 3 et sont déployées dans certains des environnements les plus complexes (secteurs militaire et aéronautique).
En ce qui concerne l'évaluation des larmes, des simulations peuvent être utilisées afin de déterminer l'instant où la longueur et l'angle de conicité deviennent trop importants/moindres et commencent par conséquent à impacter le comportement du signal.
Ici, les paramètres S au niveau de la section de larme, sur l'interconnexion, et plus particulièrement le paramètre S11 (affaiblissement de réflexion), constituent un indicateur essentiel afin d'identifier tout écart d'indépendance inacceptable. Certains solveurs électromagnétiques spécialisés (HFSS, SIwave, Simbeor) automatisent partiellement le calcul du paramètre S11 en présence de larmes.
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